Kant semble partir d'un postulat de départ: il y a des connaissances à priori et l'homme - sa raison - par sa spontanéité en est le détenteur. Pas de place pour le tâtonnement, pas de place pour une science qui serait créatrice de concepts ad-hoc. Kant veut une science apodictique, nécessaire, à priori, absolue.
On peut d'emblée en déduire que Kant veut fonder une forme de Liberté humaine, même si cette liberté n'est ni une liberté individuelle ni une liberté d'action. La spontanéité de la raison, sa capacité à pré-former, pré-voir ou mettre en forme l'expérience selon ses concepts "spontanés" - donc pas issus d'une expérience passive et pas non plus inventés - est la preuve que l'homme peut atteindre le fond et le fondement et qu'il est lui-même le détenteur de ce fondement.
Mais cela implique aussi que ce que l'homme connaît n'est que son monde, pas le monde tel qu'il est en soi - en dehors de notre faculté de le connaître - et que cette faculté de le connaître est aussi et avant tout une faculté de le rencontrer, de le faire être pour nous.
Mais cela implique aussi que ce que l'homme connaît n'est que son monde, pas le monde tel qu'il est en soi - en dehors de notre faculté de le connaître - et que cette faculté de le connaître est aussi et avant tout une faculté de le rencontrer, de le faire être pour nous.
3 commentaires:
Je commence la lecture de cette lecture de Kant depuis le début. Je me propose de réagir instinctivement, en connectant ce qui se propose comme matière avec mes préoccupations actuelles en philosophie. Disons que ce serait un dialogue entre Bauchau, Kant et les questions que Jung et Cazenave posent à Verlant en cette fin de 2009...
Première chose frappante: le champs de définition proposé est immédiatement celui de la représentation. Un monde existe en nous, il est une représentation du réel, et Kant pose d'emblée que nous n'avons pas accès, nous n'aurons jamais accès au réel. Ensuite, que même au sein de notre champs de représentation, seulement ce qui existait à priori dans notre cerveau, ce qui y était a priori concevable, peut éventuellement être repéré dans cette représentation du "hors de nous", que je nommerai candidement le réel.
En ce sens, cette exigence, cette façon de penser en "dépensant", me donne à croire que Kant à choisi une vision archi aristotélicienne, expulsant dans les limbes la croyance de Platon à un monde d'Idées. Ce thème va peut-être se renverser au fil de ma lecture de ce blog. Le point crucial est le suivant: depuis Nietzsche, et l'émergence d'une pensée scientifique positiviste, soutenue par l'émergence de la psychanalyse de Freud, et la théorie de la relativité d'Einstein, la conception d'un monde d'Idées est complètement écartée. Mais ce qui est étonnant aujourd'hui, c'est de voir revenir les concepts de monde idéal, ou monde symbolique à priori, qui aurait précédé dans le réel (si j'ose dire) l'avènement de l'univers connu, il y a 15 milliards d'années. Cazenave, en s'appuyant sur Jung, traque chez les physiciens quantiques la preuve que peut-être, il existe une trace de l'information initiale, comme les Bogdanov le croient, qui serait un schéma à priori de ce l'énergie vivra comme voyage....Chez Lacan aussi, la dialectique du moi et de son image remet Platon à l'honneur, via Hegel. Pour Lacan, l'humain est avant tout un être théorique, qui se représente la réalité avant de la laisser advenir. La vie psychique, en tout cas, se construirait sur ce modèle "imaginaire". Quel fossé existe réellement entre la psyché humaine et la nature du réel? Pour les mystiques jungiens, aucune évidemment. Et pour nous, penseurs modernes, dans quel sens ordonner destin de l'énergie et représentation symbolique du monde?
La leçon de Kant m'aidera à muscler, je l'espère, ma faculté d'ordonner la causalité.
D. Verlant, le 10 décembre 2009, 21h54
Cher Monsieur Verlant,
Avant tout: brillante intervention, je vous remercie.
Je vais me concentrer sur votre deuxième paragraphe. Il pourrait sembler en effet que Kant 'postule' que le sujet connaissant et percevant n'ait accès qu'a une représentation du réel, et que cette représentation, en tant que telle, soit soumise, nécessairement, à notre faculté de représentation, s'en remettant en dernière analyse à l'anti-argument de l'immédiate évidence. En fait, je crois qu'il n'en n'est rien. Un des problèmes de la lecture de Kant, pour nous aujourd'hui, est qu'il ne livre pas ou très peu de son matériel phénoménologique, parce qu'il pensait, ce qui est propre à son temps mais surtout aux exigences de la CRP elle-même, que seule une exposition rationalisée et systématique, une déduction selon des principes, pouvait être valable. Mais malgré ce manque un peu frustrant pour le lecteur, il nous livre des chemins pour comprendre l'origine de ses concepts.
Il faut aussi bien comprendre ce que signifie le terme "représentation" dans la CRP. Un concept est une représentation, mais le rouge est aussi une représentation, et est selon Kant un donné empirique, notre pensée n'y étant pour rien.
Prenons le temps.
Si l'on se place de notre propre point de vue - que faire d'autre? -, que pouvons-nous tirer de notre expérience subjective concernant le temps, sa nature, son origine? Nous avons l'expérience d'un changement continu: le monde change, nous percevons une multitudes d'états, un oiseau se déplace dans le ciel, les nuages avancent et se métamorphosent, le vent écoule son bruissement. Mais l'expérience brute des changements dans nos perceptions nous livre aussi autre chose: il n'existe jamais qu'un seul instant à la fois, la diversité des états ne se donne jamais en bloc - ni pèle-mêle ni ordonnée -, un 'maintenant' est donné avec chaque état comme son mode d'existence, fugace mais indéniable, et nous expérimentons dans ce 'maintenant' la néantisation de tous les 'maintenants', car c'est le propre du 'maintenant' de mourir en naissant. Autrement dit, l'expérience nous donne une durée, mais nous expérimentons à chaque fois le 'maintenant' de la donation de cette durée, et en lui elle s'anéantit comme pur effet de reconstruction à posteriori. Tout cela, je pense, peut-être tiré par simple analyse de notre vécu, sans aucun apport, si ce n'est les mots pour le dire.
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... suite
Il me semble indéniable que ce qui nous est donné - que l'on considère que tout 'ça' ne soit que le rêve de Descartes ou autre chose n'a aucune importance - est une multitude, un 'divers', d''état-maintenant' et que seul le 'maintenant' a une réalité, c'est en tout cas ce que me livre mon expérience personnelle. 'Hier' je peux m'en souvenir, mais le faisant il se donne comme plus maintenant et ne pourra plus jamais prétendre à l'être.
Bien sûr ce n'est pas moi, sujet percevant, qui détermine l'ordre de la donation, ça arrive comme ça et c'est tout. Mais jamais, à aucun 'maintenant', la succession elle-même n'est donnée. On peut imaginer tout ce qu'on veut à son sujet, et c'est peut-être vrai, mais qui pourrait le dire? La succession existe-t-elle dans l'esprit de dieu, tout entière en une fois, tous les 'maintenant' également co-existants? Qui sait... Mais il est certain que je n'ai jamais fais cette expérience empirique là!
Le temps est une synthèse de 'maintenant', une synthèse qui respecte l'ordre de la donation mais une synthèse: un acte intellectuel, une construction de notre pensée. Et cette synthèse ne nous est jamais donnée empiriquement. Pourtant seule cette synthèse constitutive d'une représentation du 'temps' peut nous permettre de percevoir un 'maintenant' comme étant 'avant' ou 'après' un autre: parce que nous accueillons les 'maintenant' à partir de notre synthèse à priori.
La question est de savoir en tant que quoi les 'choses' existent et d''où' elles viennent. Le temps quant à lui ne nous est pas donné, il peut bien exister en dehors de nous, mais ne nous étant jamais donné nous n'en savons rien. Mais les 'maintenant' nous sont donnés, qui nous apparaissent d'emblée rangés, ordonnés dans le temps, forme de notre intuition.
En conclusion... Tout ce qui précède devrait être retravaillé pour être plus clair ;-) Mais ce que j'ai voulu démontrer est qu'en analysant notre expérience intime, nous pouvons distinguer ce qui a le statut d'être 'donné' et ce qui ne l'a pas, et ne l'étant pas doit être nécessairement apporté par notre pensée. Dans la CRP, tout ce que notre pensée apporte est 'synthèse' et possibilité de la synthèse, à savoir le 'je pense', ou le 'je' comme instance à laquelle tout est rapporté et ainsi synthétisable. Car aucune synthèse n'est possible sans un oeil unique pour laquelle elle peut être 'une', sinon on retombe dans le divers d'une conscience morcelée.
A bientôt,
B
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